Le Figaro magazine, 18 février 2006, par Rémi Soulié

Benny Lévy, dirigeant de la Gauche prolétarienne au début des années 70 sous le nom de Pierre Victor, disait qu’il était allé de Moïse à Moise en passant par Mao et non de Mao à Moïse comme le prétendaient des détracteurs pressés. Il faut saluer les Éditions Verdier qui s’attachent vaillamment à publier les œuvres de celui qui fit retour à la lettre de la Torah et qui, disciple des sages d’Israël, devint un maître. Sa mort prématurée à Jérusalem, le 15 octobre 2003, fut un deuil pour toutepensée. Sous le titre Le Livre et les livres, Gilles Hanus publie un précieux recueil d’entretiens de Benny Lévy avec Alain Finkielkraut sur la question de la laïcité. Les deux hommes, si proches et si différents, croisent le fer puis fraternisent sans jamais céder sur l’essentiel : la tradition biblique pour le premier, la France républicaine pour le second. Au crible de la parole originaire, poétique et prophétique, il ne reste rien du caquetage contemporain. On pardonnera à Benny Lévy de ne pas comprendre l’articulation chrétienne du temporel et du spirituel et donc de lire saint Paul comme le ferait un moderne, et l’on saluera avec gratitude la magnifique quête de vérité qui anime ces échanges.