Transfuge, novembre 2012, par Oriane Jeancourt Galignani

L’inguérissable

Unique roman du réalisateur marocain culte Ahmed Bouanani, L’Hôpital dépeint l’univers psychiatrique, au plus près du quotidien. Un cri lyrique autour de la folie. Un grand livre.

C’est un livre tombé des enfers. L’Inferno n’est autre qu’un hôpital psychiatrique quelque part au Maroc, et l’auteur, Virgile au souffle grave, est une figure culte marocaine : Ahmed Bouanani. Il parle parmi les malades, les planqués, les laissés pour compte, les crevés, les agonisants, bref, les exclus de la société raisonnante. Oui, une voix noire chère à Foucault s’élève dans ce livre, celle de l’interné qui guette dans le visage de son lecteur les mêmes traits apeurés et violents de la bête qui s’acharne à vivre, le cul vissé sur une fosse commune. Malgré sa petite centaine de pages, L’Hôpital repose sur une ambition démesurée : celle de recréer un monde hors du temps. Thomas Mann avait fait de son sanatorium, le mythe d’une montagne magique, Bouanani transforme son asile en réserve de monstres.