Archives de sciences sociales des religions, 1986, par Régine Azria

Les Ed. Verdier ont entrepris depuis plusieurs années déjà la publication de textes fondamentaux de la tradition spirituelle et mystique juive dans des traductions françaises souvent inédites ou réactualisées.

Rabbi Moïse Cordovéro vécut à Safed au XVIe siècle. On suppose qu’il y naquit en 1522 et on sait avec certitude qu’il y mourut en 1570, laissant une impressionnante œuvre écrite, de 25 à 30 ouvrages, dont certains comportant plusieurs milliers de pages.

Cordovéro a été une des lumières de son temps. Il a formé de nombreux disciples et a exercé une influence notable sur Rabbi Isaac Louria qui devait entièrement renouveler les conceptions et l’approche de la kabbale.

Le Palmier de Débora est un texte court, à peine 70 p. Mais c’est celui, parmi l’œuvre de rabbi Moïse Cordovéro, qui a été réédité le plus grand nombre de fois. Il ne s’agit pas d’un écrit spéculatif ou ésotérique comme bon nombre d’œuvres kabbalistiques, mais d’un traité de morale qui fut et reste encore un livre de référence pour certains cercles d’étude. C’est un ouvrage d’édification qui traite de la manière dont l’homme doit se comporter et des habitudes qu’il « doit acquérir dans ses relations avec autrui pour ressembler à Dieu ». Ce qui fait la singularité de cette œuvre c’est la conjonction de l’éthique et de la kabbale, car il reste malgré tout et avant tout un texte kabbalistique.

L’action et la présence de Dieu au monde passent par les dix sefirot, ou dix degrés d’émanation ; celles-ci sont le pont jeté entre le monde sensible de l’homme et le monde supra-sensible de Dieu. Aux yeux du kabbaliste il n’y a pas de séparation entre les deux et chaque séfira indique le chemin à suivre dans l’œuvre de perfectionnement. Le livre est ainsi divisé en dix chapitres. Le chapitre I traite de la ressemblance avec le niveau le plus élevé, la Couronne, où l’homme doit s’exercer aux 13 mesures de tendresse ; le ch. 2 traite de l’humilité par ressemblance avec les traits du visage ; le ch. 3 s’occupe de la Sagesse, ou comment l’homme doit protéger toutes les créatures ; le ch. 4 traite du Discernement, ou comment faire le « retour », la techouva ; le ch. 5 explique comment parvenir à la bonté par ressemblance avec la séfira de la Générosité ; le ch. 7 traite de la Plénitude ou la Beauté, ou quelle doit être l’attitude des étudiants à l’égard du peuple ; le ch. 8 traite de la ressemblance avec les séfirot Endurance, Retentissement et Fondement, ou du soutien à apporter aux étudiants et de la vie sexuelle ; le ch. 9, à propos de la séfira Royauté, enseigne l’humilité, l’exil volontaire et les devoirs envers l’épouse ; enfin le ch. 10 indique comment l’homme doit se comporter pour maintenir le contact permanent avec la divinité.

La traduction dans une langue dépouillée de tout effet de style rend ce texte d’un accès aisé que l’on ne doit pas prendre pour de la facilité. Sa lecture gagne à être faite en parallèle avec les notes ; ce qui aide à le relier à la tradition qui le nourrit et le porte.

Encore bravo aux Ed. Verdier, nous attendons la suite !