Choisir, janvier 1999, par M. Czarnecki

Pour Mario Luzi, Léopardi a été le premier à introduire une réflexion critique dans la poésie. Dans un monde devenu vide, le poète est réduit à devenir écho. Il suit une démarche d’« orphelin de l’humanité », en exprimant les regrets, le dépouillement, la solitude ; il se sent « déplacé ». Seule demeure la vitalité du désir, qui souligne le conflit du monde et de la conscience : à la désagrégation du monde s’oppose l’entreprise récupératrice de l’unité perdue, par le langage. Ainsi rêve le symbolisme. Mario Luzi analyse, après ces principes, la place des poètes italiens : Pascoli, D’Annunzio. Puis il réfléchit sur l’aventure poétique du XXe siècle, dans un monde dégradé de son humanité. Sa pensée s’attache à la poésie, menacée par la révolution, réfugiée dans le surréalisme et tentant de s’accorder avec la réalité en transformation continue.

Mario Luzi a une réputation de poète « hermétique », justifiée dans ce petit ouvrage, qui offre une réflexion dense sur les conditions de la poésie. Il ne peut manquer de séduire les lecteurs, universitaires ou simplement cultivés, et tous ceux qui s’interrogent sur la poésie, de Baudelaire à Gide. Il offre une possibilité d’approfondir les relations que la poésie entretient avec le monde. Mario Luzi en est lui-même conscient, jusqu’à l’ascèse.