20 minutes, 16 septembre 2010, par Hubert Hartus

OUTING – L’écrivain français fait l’événement en publiant trois romans sous autant d’identités différentes…

Il est si discret qu’on pourrait presque s’y laisser prendre. Pourtant, en cette rentrée, le voilà omniprésent. D’Antoine Volodine, on connaissait les dix-huit romans publiés depuis 1985. On avait lu par ailleurs les fictions « pour adolescents » de Manuela Draeger, publiées à L’Olivier, et les fables étranges de Lutz Bassmann chez Verdier. Mais derrière Volodine, Draeger et Bassmann se cachent en réalité la même œuvre et le même homme. Ce trio révèle en tout cas une figure réelle, bien qu’orthographiquement incorrecte : un auteurs.

Irradiation et « bolchopride »

« La communauté d’auteurs imaginaires » est une question importante pour Volodine. C’est sa manière de prouver qu’un écrivain est capable de plusieurs discours, en étant l’habitacle de plusieurs obsessions. D’ailleurs, Écrivains (Seuil), son nouveau livre, s’apparente à une som­me de portraits d’« auteurs post-exotiques », aux prises avec la maladie, la dictature. Un autoportrait en creux dans un monde futuriste, où l’échec le dispute au fatalisme, dans un style brillant.

Onze Rêves de suie (L’Olivier) de Manuela Draeger raconte un ghetto dont les habitants, des créatures pleines de souvenirs et d’absence, organisent une « bolchopride », opération gauchiste qui va échouer. Piégés, ils invoquent la figure familiale et patriotique d’une grand-mère fantasmée.

Les fables apocalyptiques de Lutz Bassmann sont plus tragiques. Les aigles puent (Verdier) suit les pas de Gordon Koum, qui revient dans sa ville, où les siens sont morts et lui est irradié. C’est l’histoire d’une post-humanité nomade, mais intouchable. Très réussi. Post-exotisme, post-communisme, post-humanité : à trois, Volodine voit très loin.