La Dépêche du Midi, 3 décembre 2014, par Patrick Louis

Joselito, une si douce drogue

Nos yeux ne mentaient pas. Il était la dans ce costume « bleu Joselito ». Là comme s’il n’était jamais parti. Là pour toujours. Certains toreros élus, déjà maîtres du temps et des gestes, peuvent aller et venir sur la piste de sable sans jamais perdre une paille d’or. José Miguel Arroyo fait partie de cette caste. Le long chemin qui l’a ramené à s’habiller de lumières, un dimanche de juin à Istres pour l’alternative de Cayetano Ortiz ne l’a pas fatigué.

« Si je n’avais pas été torero… »

Son bras gauche abandonné le long de la cuisse lors d’interminables derechazos tissés sur la partition de « L’hymne » de Piaf, sa cape rassurante, dégueulant de douceur, son sourire d’adolescent aussi, à l’instant du triomphe. Son corps tout entier posé en arrière sur les talons, José a toréé comme dans nos souvenirs et presque mieux que dans nos rêves.

Le soir, tout le monde le voulait, toutes les empresas espéraient un signal pour pouvoir l’annoncer, au moins l’espérer. Joselito ne les a pas entendu comme il ne les a jamais attendu. Il s’est déshabillé, heureux dit-on, il s’est douché, et il a fini la soirée avec ses amis. Morante de la Puebla, Antonio Barera, Bernard Marsella l’heureux patron des arènes provençales, ils ont tous avancé main dans la main et le miracle a eu lieu.

« Si je n’avais pas été torero, je serai mort d’une overdose… » confie José Miguel Arroyo dans l’incroyable roman de sa vie. Recueilli par Enrique Marin Attanz et son épouse, le gosse perdu du Madrid de la Movida a choisi une autre drogue.

Pour aller plus haut maintenant, Bernard Marsella n’a pas beaucoup de solutions. Persuader José Tomas ou sortir Curro Romero de sa retraite. La Faraon a soufflé ses 81 bougies lundi.