Le Monde, 16 octobre 2015, par Julie Clarini

Naissance du « starducteur »

Avec le passage du Moyen Âge à la Renaissance, l’acte de traduire se métamorphose. Une « loi de traduire » commence à s’imposer, avec ses règles et ses exigences, explique Véronique Duché, qui a assuré la direction du nouveau volume (plus de 1 300 pages) de l’Histoire des traductions en langue française, consacré aux XVe et XVIe siècles. L’ouvrage commence à la naissance de l’imprimerie, se termine à la fin du règne d’Henri IV et retrace un âge d’or de la traduction qui doit autant au retour aux sources prônés par les humanistes, à leur passion de l’Antiquité, qu’à une nouvelle circulation des textes et à l’impulsion royales, en particulier celle de François Ier.

Conçu sur le même mode que les deux précédents (XIXe siècle et XVIIe-XVIIIe siècles, Verdier, 2012 et 2014), l’ouvrage brasse tous les genres et les domaines (textes sacrés, œuvres philosophiques, travaux scientifiques, récits de voyage, ouvrages historiques… mais aussi théâtre, poésie, prose narrative, etc) et met en relief continuité et ruptures : « Tout au long de la période considérée dans ce volume émerge progressivement la figure d’un traducteur nouveau, dont le statut oscille entre invisibilité et célébrité : invisible quand il est anonyme, le traducteur devient parfois « starducteur » (osons ce mot-valise !), comme Jacques Amyot qui, sans avoir jamais rédigé une œuvre propre, fait figure de modèle de d’écrivain à par entière », remarque Véronique Duché.

L’entreprise monumentale de l’Histoire des traductions en langue française, dont Yves Chevrel et Jean-Yves Masson sont les maîtres d’œuvre, se terminera avec un ultime volume consacré au XXe siècle.