Franz Michael Felder

Scènes de ma vie

Récit autobiographique. Traduit de l’allemand (Autriche) par Olivier Le Lay. Préface de Peter Handke. Postface de Jean-Yves Masson

Collection : Der Doppelgänger

320 pages

22,00 €

978-2-86432-751-6

février 2014

Rien ne destinait Franz Michael Felder (1839-1869) à laisser une trace de sa brève existence. Paysan pauvre d’une vallée perdue d’Autriche occidentale, il eut à vaincre mille obstacles, à commencer par les préjugés de son milieu, pour accéder à la littérature et à la poésie, objets précoces de son ambition. Auteur de romans, de poèmes, d’essais et d’une ample correspondance, il laisse surtout un chef-d’œuvre, publié au lendemain de sa mort : son autobiographie.

S’il faut lire ce livre, ce n’est pas seulement parce qu’il s’agit probablement de la toute première fois où s’éleva, dans l’empire autrichien (et même en Europe), une voix venue des profondeurs de ce monde rural que tant de romanciers idéalisaient alors sans le connaître. En effet, voir dans les Scènes de ma vie un document sur la paysannerie, ce serait passer à côté du génie de Felder. Ce qui sidère le lecteur d’aujourd’hui, c’est l’évidence de sa vocation littéraire. Dans la langue exceptionnellement fidèle, riche et imagée de la traduction d’Olivier Le Lay, Felder parvient à rendre intensément présentes toutes les situations qu’il décrit. Dès les premières lignes du livre, il est là, en chair et en os, qui entreprend de raconter les « vies minuscules » de ses compatriotes et la sienne, sans apitoiement : simplement pour en dégager la vérité universelle.

Réédité tout au long du xxe siècle, jamais oublié, Felder est longtemps resté un auteur pour initiés. C’est Peter Handke qui l’a vraiment fait découvrir au grand public germanophone en préfaçant en 1987 l’édition de poche des Scènes de ma vie. La préface de la présente édition est un texte nouveau, spécialement écrit par Peter Handke pour ses lecteurs francophones.

Il existe aussi une poésie de la mort, profonde, merveilleuse ; si profonde et merveilleuse qu’il s’en faut de beaucoup que nous la ressentions tous. Le sommeil est l’image la plus fidèle de la mort. Mais celui qui, comme nous maintenant, veille toute la nuit dans le petit village silencieux et enserré de montagnes, est pareil à qui a vu ce qu’il a de plus cher périr sous ses yeux. Son regard mélancolique s’élève et fuit le monde sombre qui, dans sa quiétude figée, apparaît bien dur et égoïste à celui qui ne sommeille pas. Le voici seul dans l’ombre ; mais là-haut des milliers et des milliers d’étoiles lui font signe, l’attirent vers l’infini, et son être se dilate merveilleusement, au point qu’il ne désire plus le vacarme du jour, ne souhaite plus retrouver l’agitation fébrile et insatisfaite des hommes. Si le jour avec ses images chamarrées nous montre la grandeur et la petitesse de l’esprit humain, toi, Mère Nature, si accueillante, tu es pour le solitaire l’annonciatrice sublime de la toute-puissance, de l’infinité du Seigneur qui maintient le monde, tu es pour lui l’image même de l’éternité. Oh, sachez que certains que vous aviez cru si malheureux, qui du reste l’étaient et que vous ne saviez distraire ni consoler, qui traversaient furtifs et indifférents les plus bruyantes de vos fêtes, pouvaient dans le silence de la nuit tombante, où plus une image de douleur, de discorde ne retenait captif leur esprit, immerger leur souffrance dans le grand tout, disparaître dans la mer sans rive du néant.

Autour de nous aussi, depuis la mort de mon père bien-aimé, il faisait nuit partout.

Prix Laure-Bataillon, 2014 (pour la traduction)

Prix Mémorable (du groupement de libraires indépendants Initiales), 2015

Initiales, avril 2016, par Claire Nanty (Livre aux Trésors, Liège)

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La Vie en livres, 16 novembre 2014, par Aliette Armel

Un prix littéraire qui ne doit pas rester inaperçu

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Presse Océan, 17 novembre 2014, par Laurent Huou

« Œuvre universelle »

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La Revue des deux mondes, juin 2014, par Édith de La Héronnière

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Blog de la Librairie Ptyx (Ixelles, Belgique), 25 février 2014, par Emmanuel Requette

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« Les bulles du vendredi », présentation par Claire Nanty, Librairie Livre aux trésors (Liège, Belgique), Musiq’3, RTBF, samedi 29 novembre 2014 à 0h

« Traversées du monde », Fréquence Protestante, par Malou Bernasconi, avec Jean-Yves Masson, mercredi 24 septembre 2014 à 14h