Jean-Pierre Richard

Nausée de Céline

Collection : Verdier/poche

96 pages

5,89 €

978-2-86432-523-9

janvier 2008

«  Son écriture est une danse qui soulève, une musique qui anime rythmiquement la lourdeur de l’exister. Mais d’où cette danse musicale tire-t-elle la force de son surgissement ? À quelle profondeur, quel sous-sol libidinal emprunte-t-elle son énergie, sa puissance si bouleversante d’émotion, puisque c’est à sa densité émotionnelle que Céline reconnaît la présence d’un grand style ? Il ne suffit pas en effet de dire que l’écriture délivre de la pulsion : il faut aussi rêver comment elle s’enracine en elle, et l’accouche, la résout, la parle…

À ces questions les Entretiens avec le Professeur Y apportent une admirable réponse onirique. On y trouve, tout au long d’un développement ruisselant, effiloché, sans cesse coupé d’incises burlesques et étrangement, sexuellement obsessionnelles, une théorie de l’écriture pulsionnelle. »

Dans le débraillé, si infâme qu’il soit, il nous faut cependant reconnaître l’authentique révélation d’un être et comme l’épiphanie d’une vérité. Cette vérité est celle d’une force centrifuge, éternellement fuyante hors d’elle‑même, qui échappe toujours aux formes, aux lois, et jusqu’à la pensée qui voudrait la fixer et l’exprimer. Le débraillé marque la première apparition de cette force, il en qualifie le surgissement épidermique, en définit formellement le débouché. Ainsi dans le texte suivant où Bardamu, embarqué pour l’Afrique, voit s’affirmer soudain chez ses compagnons de voyage leur essence jusque‑là dissimulée : « C’est depuis ce moment que nous vîmes à fleur de peau venir s’étaler l’angoissante nature des blancs, provoquée, libérée, bien débraillée enfin, leur vraie nature ; tout comme à la guerre […] C’est alors qu’on se déboutonne éperdument et que la saloperie triomphe et nous recouvre entiers ». Pour terminer par la formule décisive qui affirme, dans le registre de la chair, la valeur révélante de tout ce débraillage : « C’est l’aveu biologique ».