Christian Garcin
La piste mongole
Collection : Collection jaune
320 pages
18,25 €
978-2-86432-571-1
février 2009
Où l’on part à la recherche d’Eugenio Tramonti, le protagoniste du Vol du pigeon voyageur et de La Jubilation des hasards, disparu quelque part en Mongolie. Pour le retrouver il faudra traverser des états de réalité peu ordinaires et accepter de se laisser guider par quelques personnages emblématiques : un Chinois qui présente la particularité de maîtriser ses rêves ; une chamane mongole qui s’absente parfois quelques jours pour voyager dans d’autres mondes dont elle ne se souvient pas ; une Sibérienne qui fréquente assidûment les choses invisibles ; un jeune garçon, apprenti chaman, qui vient interférer dans les rêves du Chinois ; une vieille femme aux identités mouvantes ; une divinité lacustre aux faux airs de renard ; des juments, un aigle et un loup ; sans compter quelques narrateurs, anonymes ou pas, disséminés entre Oulan Bator et Pékin, le lac Baïkal et les hauts sommets de l’ouest de la Mongolie. Les mondes se chevauchent, les histoires se répondent les unes aux autres, les fenêtres de l’imaginaire sont grandes ouvertes, les narrateurs se superposent, et le principe de réalité tremble sur ses bases, à la fois labile, humoristique et fuyant. Et ce faisant c’est une autre réalité qui se trouve posée là – ou tout un réseau de réalités qui s’entrecroisent, car l’instabilité est féconde, et la littérature s’accommode bien de ce flou des frontières.
Nous étions debout à l’entrée de la yourte, silencieux, à regarder la jeune femme environnée de fumée qui parlait vite, les yeux fermés, d’une voix monocorde, tandis que la vieille au long nez, assise face à elle et penchée en avant, l’écoutait avec attention, ne l’interrompant qu’à une ou deux reprises, et à tout cela je n’entendais évidemment rien. Amgaalan m’avait proposé de traverser la ruelle afin d’écouter et voir, vous allez peut-être assister à quelque chose d’intéressant, m’avait-il dit, la vieille est un peu sorcière, une chamane assez connue ici, et cette histoire d’opéras chinois m’intrigue un peu. Quelle histoire d’opéras, avais-je demandé, et il m’avait dit que la vieille femme, qui était entrée chez lui en faisant mine de ne pas même m’avoir remarqué bien qu’elle fût assise à quelques mètres de moi, venait de lui demander de passer une cassette d’opéra pour sa cousine qui en réclamait. Je trouve ça vraiment bizarre, m’avait-il dit, d’autant qu’elle-même (il montra la vieille d’un mouvement du menton) déteste ça, je le sais, mais nous pouvons aller voir ce qu’il en est si vous le souhaitez, elle est d’accord, nous reprendrons notre conversation après. Je ne voyais pour ma part aucun inconvénient à suspendre cette conversation courtoise mais qui ne menait à rien, pour traverser la ruelle défoncée, enjamber ruisselets d’eau grise, chiens endormis et porcelets indifférents, et me rendre dans la yourte d’à côté, aussi misérable que celle d’Amgaalan, dans laquelle la vieille qui nous avait précédés frappait un petit tambour, assise face à une grosse jeune femme qui semblait saoule, dodelinait de la tête les yeux fermés, en marmonnant je ne sais quoi entre ses lèvres épaisses et à peine desserrées. Je pense que ce n’est pas vraiment sa cousine, me chuchota Amgaalan : à chaque fois que quelqu’un vient chez elle, elle dit qu’il s’agit de cousins ou cousines. Qui est-ce, alors, avais-je demandé par politesse, car cela m’indifférait totalement. Une chamane comme elle, je suppose, ou une apprentie chamane, regardez, elle est en transes, il me semblait bien que cette histoire d’opéras chinois était un peu bizarre. Et on entendit à ce moment-là les premiers passages de récitatifs, péniblement aigus, retentir dans la yourte d’Amgaalan. La grosse jeune femme se mit alors à parler, d’abord lentement, puis de plus en plus vite, toujours les yeux fermés, tandis qu’Amgaalan et moi étions debout à côté de l’entrée de la yourte.
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« Le Choix des livres », par Céline Geoffroy, France Culture, mercredi 25 février 2009 à 21h
Traductions
Монгольский след, пер. с французского, Юрия Борисевича, Минск, Макбел, 2013 (isbn : 978-985-6347-83-5).