Études, juillet 2009, par Christophe Henning
« Voilà ce que racontent les gens bien informés, mais ils sont les seuls à connaître leurs sources, et nous, les autres, nous ne sommes pas en mesure de les contredire… » Le ton est donné : dans ce dossier imaginaire d’un fait historique, les avis sont partagés et les témoignages pas forcément concordants. Une chose est sûre : lors du déifié célébrant le 80e anniversaire de l’indépendance du Mexique, le caudillo Porfirio Díaz – qui régna en maître sur le pays pendant trente-cinq ans – est victime d’une tentative d’assassinat. Bien piètre attentat, en fait, car Arnulfo Arroyo, plus éméché encore qu’à son habitude, l’attaqua sans calcul, à mains nues, en ce 16 septembre 1897 qui lui fut fatal… Car l’agresseur bientôt arrêté est à son tour victime d’un lynchage funeste. On ne saura jamais le fin mot de l’histoire, mais ce fait divers est prétexte à un roman brillant d’Álvaro Uribe. Le « dossier » est bien ficelé, l’écrivain aimant ajuster, tel un puzzle, les pièces d’un ensemble complexe, voire mouvant. Car, après tout, était-ce l’acte suicidaire d’un ivrogne ou bien un complot savamment monté quoique avorté ? En assemblant les dépositions diverses, ce sont les petites stratégies personnelles et les basses compromissions des politiques, de la presse, de l’armée qui sont les accusés de ce « dossier de l’attentat ». Serait-ce une manière, pour l’écrivain d’aujourd’hui, de dénoncer quelques réalités contemporaines ? La fable, en tous cas, d’une belle écriture, fait revivre l’époque, le Mexique, avec panache et justesse.