Le Magazine littéraire, mars 2009, par Pierre Assouline

La nouvelle garde, état des troupes

[…]   C’est Álvaro Uribe (1953) dont le fascinant roman Dossier de l’attentat intègre le théâtre, la correspondance, les rapports de police, le reportage, le journal intime… Pourquoi Arnulfo Arroyo a-t-il fait le pari de tuer le président Porfirio Díaz ? Pourquoi a-t-il vainement essayé de le tuer en lui sautant à la gorge au cours d’un défilé militaire après avoir égaré le couteau avec lequel il voulait le poignarder ce 16 septembre 1897 ? Fidèle à la règle des trois unités, l’auteur est parti de ce fait divers politique demeuré une énigme. Réussi, l’attentat aurait bouleversé le cours de l’histoire mexicaine. Mais ce n’est pas une fiction : le vrai dossier de l’affaire ayant disparu, Álvaro Uribe a juste inventé ce qui lui paraissait nécessaire, convaincu que la société porfirienne est restée en place (corruption, répression, etc.). C’est F.G., l’un de ses personnages, qui doit être content là-haut : « Federico Gamboa en réalité, le Zola mexicain, qui avait connu le meurtrier mais se refusait à écrire sur l’affaire. J’ai écrit le livre à sa place. » Mais ce n’est ni auprès de Michon ou Echenoz, si populaires auprès des écrivains mexicains, qu’il a trouvé l’inspiration. Plutôt Vargas Llosa et, pour ses qualités de mosaïste et d’arrangeur de fragments, auprès du Marcel Schwob de La Croisade des enfants. […]