Le Figaro magazine, 1er décembre 2007, par Rémi Soulié
Il est heureux que les éditions Verdier continuent à défendre l’œuvre de Benny Lévy, philosophe disparu en 2003, en l’occurrence à travers la publication de ses cahiers inédits et d’un essai de Gilles Hanus, directeur des Cahiers d’études lévinassiennes. Le premier ouvrage, Pouvoir et Liberté, est constitué de notations échelonnées de 1975 à 1980, époque où Benny Lévy dialogue avec Jean‑Paul Sartre autour d’une idée centrale : la révolution. L’archétype en est évidemment 1789, récit originel en deçà duquel Benny Lévy, « méfiant », redoute « quelque piège secret » avant qu’il ne pressente, avec la découverte de Platon et de l’hébreu biblique, l’urgence d’en « sortir : « C’est vers la Parole que nous tendons. » Le second ouvrage, L’Un et l’Universel, forme une méditation sur l’antagonisme entre Athènes et Jérusalem, l’humanisme moderne et son « universalité impersonnelle qui fait retour à des noms de substitution (autrui, l’homme) prenant la place du Nom ». « Par‑delà le geste propre de Lévinas, estime Gilles Hanus, on peut appeler “pensée du Retour” toute pensée qui restaure le souvenir du Dieu du chapitre 33 de l’Exode, là où ce souvenir s’est dégradé au point même de sembler absent. » Deux ouvrages exigeants mais porteurs d’interrogations radicales, donc de pensée.