Livres hebdo, 3 décembre 2004, par Jean-Claude Perrier

Garcin le virtuose

[…] Quant aux nouvelles de La neige gelée ne permettait que de tout petits pas, elles procèdent du même esprit : chacune met en scène un personnage trivial, au moment où sa vie pourrait basculer. Comme ce représentant de commerce qui rêve d’assassiner sa femme et finira par rester la nuit, sous la neige, dans sa voiture, sans oser rentrer chez lui, après une journée entière à imaginer (et savourer) différents moyens de passer à l’acte. Ou cette femme qui s’ennuie tant dans un train avec son mari qu’elle descend à un arrêt, prend une chambre dans un hôtel anonyme, et s’endort. Le représentant tuera-t-il sa femme un autre jour ? Et la dame rejoindra-t-elle sa famille ? C’est le propre des nouvelles de ne pas nous le dire. De nous laisser dans cette expectative, entre le réel et le rêvé, où Christian Garcin se plaît à nous entraîner.

De livre en livre, et quel qu’en soit le genre, Garcin construit son univers, si personnel. On l’y suit avec toujours la même jubilation. Un mot qui lui va à ravir.