TOC, janvier 2005, par Vincent Monadé
La première nouvelle, qui donne son titre au recueil, peut se résumer à cette image : une fin de journée, un homme dans sa voiture devant le domicile conjugal. Les heures passent et il observe de l’extérieur les lumières allumées de son salon. Dans une autre, une femme part rendre visite à sa fille avec son mari. Le temps d’un arrêt, elle descend du train, seule, s’enfonçant dans une ville inconnue. Ces six nouvelles disent la désunion qui peut s’opérer entre un être et sa vie : des hommes et des femmes, en un état serein, cotonneux, observant en étrangers indifférents ce qui fait leur existence. Du jour au lendemain, sans crier gare, les choses leur parviennent comme assourdies et la voix intérieure, insatisfaite, mélancolique, parvient à se faire entendre.
Le titre de ce recueil n’est pas usurpé. Sans spleen aucun, Christian Garcin nous plonge dans une atmosphère de jour enneigé. Ces nouvelles donnent à entendre, non la fureur du monde, qui n’est plus ici que vaines gesticulations, mais le cœur des hommes, ces petites perceptions et sentiments qui teintent les jours : « Peut-être l’extrême banalité contient-elle, dissimulé sous une épaisse couche d’apparente insignifiance, plus de potentiel émotif que l’aventure », nous suggère Garcin. La prose s’écoule, fluide, sans heurt, comme chuchotée, fidèle aux sensations de ces jours de torpeur où le silence se fait dans les têtes. Une très belle lecture de saison.