Études, janvier 2011, par Philippe Charru
L’auteur a eu la chance de passer quelque temps à la villa Kujoyama, une sorte de villa Médicis japonaise qui accueille à Kyoto des écrivains et artistes de tous horizons. Parti de France où il avait l’impression « de se trouver face à un mur, d’être mort », il voulait « retrouver une nouvelle manière de respirer aussi bien que d’écrire. » Cette quête de lui-même se jouera entre la découverte du Japon, la pratique du kyudô (art ou chemin du tir à l’arc) et la rencontre de Yuki dont il tombe amoureux. Ce récit à l’allure d’autofiction est à l’image de l’opacité flottante du Japon : le réel et l’imaginaire, le passé et le présent, le dit et le non-dit, le conscient et l’inconscient, le vouloir et le non-vouloir tissent un écheveau que l’auteur tente de démêler. Comme à travers les idéogrammes qu’il regarde sans en comprendre la signification, il « marche dans un labyrinthe de signes fabriqués par notre esprit pour envelopper une réalité qui nous échappe, parce que nous la convoitons ou qu’elle nous effraie. » Son livre se lit comme un journal éclaté, au seul rythme des saisons et des rendez-vous réguliers au dojo où il s’exerce au kyudô auprès de maîtres qui sont des sages ne manquant pas d’humour. Ce livre, écrit dans un style incisif très personnel, est tout entier placé sous le signe du lien métaphorique que Vincent Eggericx a découvert entre le tir à l’arc et la littérature : « La cérémonie du tir était le film lent de la rencontre de l’universel et du particulier, du vieux mystère avec la fugace présence humaine. La littérature était la somme d’une existence sublimée dans un livre : le livre aussi bien que le tir mettaient en scène une naissance et un anéantissement, les ramassaient dans une forme signifiante. » Mise en scène ou voie de sagesse ?