Le Magazine littéraire, mars 2014, par Clémentine Baron
Goethe, la flamme et les cendres
Le récit des dernières années de Goethe nous a été transmis par Eckermann, son « secrétaire » (qui ne l’était pas), dans ses fameuses Conversations avec Goethe. Dans ce roman déguisé en témoignage, Jean-Yves Masson imagine les jours qui suivirent l’incendie du théâtre de Weimar, que Goethe avait fait construire, puis avait dirigé pendant près de trente ans. En mars 1825, les flammes ravagent l’édifice, et le grand poète, devenu vieillard, ne daigne pas se déplacer. Pourtant, à l’aube, le fidèle Eckermann le trouve affligé comme après « la mort d’un parent ou d’un ami ». Très vite, l’idée germe d’un nouvel édifice. Goethe trépigne, dessine et convoque des architectes. Le grand théâtre de Weimar renaîtra de ses cendres, sera un phénix merveilleux, un chef-d’œuvre ! Le projet avorté rappellera que, dans un théâtre, il n’y a que « les comédies, les tragédies, les opéras qu’on y joue qui ont droit ou non au titre de chef-d’œuvre ». Et que La Flûte enchantée, si chère à Goethe qu’il tentera d’en écrire la suite, relève de l’art le plus haut, qu’elle soit jouée dans un grand théâtre, sur des tréteaux ou dans une grange.