Midi libre, 23 décembre 2005, par Jacky Vilacèque
Pradeau : magnifique retour en enfance
À l’aune du succès de librairie d’aujourd’hui, cet auteur, Christophe Pradeau – dont on ne sait rien – n’a rien à vendre. Pas d’enfance déplorable à confesser. Pas de traumatisme à psychanalyser. Pas de graveleuses turpitudes à déballer. Et, en plus, c’est un premier roman. Toutes circonstances difficilement admissibles.
Et pourtant, on tient à saluer ce livre. À dire combien il est précieux que des auteurs sachent encore écrire comme cela et qu’un éditeur – l’Audois Verdier en l’occurrence – sache prendre le risque de le publier. Car quel délicieux petit roman ! Quelles merveilleuses phrases que celles-là ! Et comme elles forent dans les lointaines nappes de l’enfance avec une délicatesse proustienne et une étrangeté de Grand Maulnes.
Ce n’est rien pourtant que cette histoire juste un vieil enfant qui se souvient. D’une sœur disparue et qui le fascinait, d’un pays qui avait les terreurs et les beautés de tous les paradis perdus, de jeux puérils et cruels au fond des brouillards et des forêts qui menacent. Vieil exercice de notre littérature, certes.
Mais il y a longtemps que des phrases, souples, ondoyantes, magnifiques, n’hésitons pas, n’avaient éveillé autant d’échos. C’est qu’il ne s’agit pas de souvenirs d’enfance, on l’aura compris, mais d’une exploration au pays de toutes les enfances. Un livre qui émeut.