Communauté des religions, juillet 1997, par A.D. Grad
L’ouvrage de R. M. Cordovero, ’Or Né’érab, Douce Lumière en français, a été édité pour la première fois à Venise au XVIe siècle par le fils unique du grand kabbaliste, R. Gedalia Cordovero, né à Safed, un savant particulièrement estimé en Palestine. Des additions ont été introduites dans le texte par le maître italien R. Menahem Azaria de Fano. Le ’Or Né’érab est généralement moins connu que le Pardès Rimonim (Le Verger des Grenades) ou le Tomer Deborah (Le Palmier de Deborah).
« Doux » (mâthôq) et « agréable » (ârev, d’où le titre hébreu) à ceux qui l’entendent, l’ouvrage revêt cependant un caractère polémique dans sa défense vigoureuse de la kabbale, tout en prétendant servir d’introduction à la pratique de cette science. Divisé en courtes parties (la seconde tient en sept pages), le ’Or Né’érab réfute les convictions de ceux qui délaissent la kabbale, croyant qu’elle leur nuira. Il y a au contraire obligation pour le sage d’étudier « les sciences métaphysiques », terme par lequel R. M. Cordovero désigne la kabbale. Le maître prodigue ses conseils aux débutants pour choisir le temps et la méthode de cette étude qui doit se réaliser dans la joie, la crainte et l’humilité. Il énumère les références indispensables pour les débutants, à savoir les écrits de R. Siméon bar Yo’haï, le Zohar, le Ra’aïah Mehemnah, et parmi les traités antérieurs, le Sefer Yetsirah et le Bahir.Plusieurs périscopes zohariques servent d’ailleurs de bases aux exposés qui démontrent que le mérite des maîtres de la kabbale est beaucoup plus grand que celui des maîtres de la Bible ou de la Michnah.
Selon le traité, la kabbale possède des avantages incomparables qui permettent d’expliquer certains sujets de la Torah, incompréhensibles pour ceux qui n’utilisent que le sens littéral, et ne peuvent justifier par exemple certaines lettres supplémentaires, ou les mots lus et non écrits, ou les mots écrits et non lus, etc. Ce n’est qu’au dernier chapitre que sont présentées des prémisses indispensables aux débutants. Elles sont résumées dans un ordre différent de celui que l’on trouve dans le Pardès Rimonim. R. M. Cordovero définit l’Un sans pareil (Eyn-Sof, qui n’est pas Keter,précise-t-il, comme beaucoup le croient). La Cause des causes, le Principe des principes a émané lessefirot par lesquelles il agit. La disposition des sefirot, les canaux, l’unification des mîddôt auxquelles sont attribuées des couleurs suivant leurs actions, sont autant d’éléments de connaissance nécessaires à qui souhaite s’engager sur le chemin kabbalistique. Mais sans rectitude morale et le respect des lois et de l’étude du Talmud, il serait vain de prétendre affronter l’initiation aux mystères.
Sur six chapitres, cinq sont entièrement consacrés à la défense de la kabbale. Il est vrai que le dernier chapitre est nettement plus long que les précédents. La Douce Lumière ne peut que rappeler le Palmier de Deborah par ses principes moraux, et bien entendu le Verger des Grenades par ses vues systématisées des principes de la kabbale.