BCLF, février 1989
Abou Ya’qûb Sejestânî (ou Sijzi) fut un des auteurs les plus importants de la secte ismâ’îlienne du chiisme, avec le titre de dâ’î, « propagandiste ». Ayant vécu en Iran au Xe siècle, à l’époque où l’ismâ’îlisme prenait le pouvoir en Égypte, c’est un témoin précieux d’une période très créative de la pensée philosophique ismâ’îlienne pénétrée de néo-platonisme. Il écrivit en arabe ce Dévoilement des choses cachées dont on n’a retrouvé que cette originale et intelligente traduction persane faite avant le XIIe siècle. Le regretté Henry Corbin a publié en 1949 le texte persan avec une introduction. Il avait préparé, en 1948, une traduction française qu’on publie maintenant avec les quelques pages d’introduction qu’il avait rédigées. On peut donc lire maintenant ce curieux ouvrage, ordonné en sept chapitres, chacun subdivisé en sept « recherches ». Partant de l’Unique primordial, de l’En-soi indicible, Principe instaurateur, l’auteur en expose les successives émanations, à partir de l’Intelligence première, Archange-Logos, jusqu’au monde de la Résurrection, dont le seigneur victorieux sera le Mahdi messianique, réalisant la promesse faite à Jésus, descendu du ciel, seul d’entre les prophètes, mais apparemment abandonné à ses ennemis. H. Corbin, un des rares à pouvoir le faire, sinon le seul, a traduit avec clarté ce texte ésotérique difficile. Il faudra en chercher le commentaire approfondi dans d’autres œuvres de ce savant qu’en retour il aide à mieux comprendre.