Olé !, 16 décembre 2010, par Daniel Bégard
Quelques années avant que les institutions ne pratiquent un hommage désormais constant à Pierre Soulages – notamment et avec les moyens que l’on sait pour le Musée Fabre – un écrivain montpelliérain Jacques Laurans écrivait un texte, court et fort qui par sa pertinence, et au-delà d’un coup de cœur forcément personnel, saluait avec talent la singularité et la poétique d’une démarche artistique. C’est ce texte, augmenté d’apports importants dans la même ligne, que publient aujourd’hui les éditions Verdier.
Pour approcher l’œuvre de Soulages, Jacques Laurans rappelle à juste titre que « notre perception ordinaire des choses, l’inconnu, l’inconnaissable, s’allie souvent à l’ombre et à l’obscur » et que 1e noir est souvent, à l’enfance, la marque d’un seuil qu’il faut franchir. Passer outre est alors la condition pour aller au monde, comme plus tard à l’œuvre inconnue. Bien entendu lorsqu’il visite son ami Pierre Soulages en son univers sétois, il ne s’agit plus de cela, même si, probablement, quelque chose en demeure.
C’est qu’en effet, l’univers du peintre est celui des pleines et incessantes questions des choses premières où tout se joue entre opacité, intensité et transparence. Le noir, le gris, le blanc, comme dans la vie peut-être ou, ainsi que le suggère Laurans, comme le paysage sétois sous l’orage. Mais le noir, qui domine, conserve toujours son essence propre qui est d’ambivalence « d’autant plus noir qu’il autorise une source de lumière » et que celle-ci « est d’autant plus claire qu’elle s’extrait elle-même du noir ».
Clarté et obscurité, il y a donc toujours un seuil à franchir, un franchissement nécessaire, telle est la belle leçon de Soulages que Jacques Laurans restitue par des textes lumineux !