La Liberté, 1er mars 2008, par Jacques Sterchi

Un talent confirmé

Révélé aux lecteurs francophones il y a deux ans avec Quinze Mille Pas, l’écrivain italien Vitaliano Trevisan confirme son talent particulier avec Bic et autres shorts. Quarante-deux récits brefs, toujours conduits par cette écriture rigoureuse, obsessionnelle dans le rendu des détails, mais sachant jouer de façon virtuose avec le temps et l’espace. Un « short », faut-il préciser, est un peu l’ancêtre du vidéo‑clip. Dans les années quarante, ce court‑métrage permettait de présenter un morceau de jazz. Et du tempo il y en a chez Trevisan, avec des accélérations dignes d’une improvisation musicale. C’est d’ailleurs le bonheur de cette lecture : jouer avec le souffle, la lenteur et l’accelerando, pour saisir le fond du propos.

Car Bic et autres shorts est bien plus qu’un brillant exercice de style. La forme brève permet des flashes sur le désespoir de Trevisan face à la vie contemporaine, injuste, sauvage comme l’urbanisation de son pays. Un désespoir d’où surgit souvent l’humour, par les situations décalées que l’écrivain italien imagine. Rien que le premier short est à la fois tragiquement absurde et drôle : un musicologue suisse abandonne tout pour trouver l’origine d’un briquet Bic, dont la couleur lui était jusque‑là inconnue et qu’il a découvert dans sa poche. Une excellente introduction au livre, montrant avec quelle finesse le propos glisse dans le temps de l’espace.