La Montagne, Mag dimanche, 19 octobre 2014, par Daniel Martin
Passer de l’autre côté
Philosophie et fantastique.
Les frontières existent encore. Très connu en Italie où il est considéré comme un auteur majeur et couvert d’éloges, Antonio Moresco arrive tardivement en France avec cette première traduction, La Petite Lumière. Roman d’une grosse centaine de pages, dont la tonalité fait d’abord penser à cet autre transalpin Mario Rigoni Stern, ou aux Américains du XIXe siècle, Emerson, Thoreau. Ceux qui vivent en pleine nature des expériences inédites de solitude et de médiation.
Précisément ce que fait le héros, ici. Âgé, il se retire dans un village de montagne abandonné. Alentour, la végétation, lentement, reprend ses droits et, bientôt, va tout recouvrir.
Seules les traînées blanches que laissent les avions dans le ciel lui rappellent le monde moderne qu’il vient de renier. Il marche, réfléchit, s’ennuie un peu. Et pense. On s’attend à quelque leçon de sagesse écolo-bon teint.
On la redouterait presque, quand on a déjà basculé dans un autre univers. Intrigué par la petite lumière qu’il aperçoit de l’autre côté de la vallée, l’ermite veut en savoir plus, mène l’enquête, interroge les rares personnes qui vivent dans les parages, vieillards ou migrants et, finalement, franchit le pas. Ose aller sur place. Rencontre un enfant. Étrangement seul dans ces lieux. On vient de franchir une autre frontière, celle qui sépare le monde des vivants de l’ailleurs et plonger dans une ambiance qui tient d’une science-fiction mâtinée de philosophie, relevée d’un brin de métaphysique. La fin, très ouverte, peut prêter à mille interprétations…
Un incontournable !