Par Renaud Musseau, Librairie Le Point de Côté (Suresnes), novembre 2014

Dans La Route de McCarthy, le drame a déjà eu lieu, ici, le drame est à venir, attendu, pressenti d’abord par la nature anxieuse, la forêt aux aguets. Il semble y avoir peu d’Hommes sur cette terre, certainement retranchés dans une indicible angoisse. De toute façon, eux ne font qu’habiter un lieu dont ils ne sont pas maîtres, à peine ont-ils tenté de le domestiquer sans bien y parvenir. Et puis il y a les chiens, les sentinelles, gardiens infirmes et débiles de la peur qui suinte des maisons. Car nous sommes au bord de l’effondrement , les arbres majestueux « s’agitent à crever » comme les grappes d’amygdales des « Assis » de Rimbaud, des animaux se « cognent à des plafonds pourris », telles les chauves-souris chères à Baudelaire, la grêle hache les fleurs tendres de printemps. Pourtant il existe une petite lumière qui brille , la nuit, de l’autre côté de la vallée…

La quantité d’Amour dont on dispose est-elle proportionnelle à celle du désespoir dont on souffre ? Si tel est le cas , la petite lumière n’est-elle pas, en définitive, le gigantesque incendie dont seul notre aveuglement nous sépare ?

Ce magnifique ouvrage , splendide parabole sur la solitude et l’espoir ,est sans doute l’un des plus beaux textes qu’il nous ait été donné de lire en cette rentrée littéraire. Las, il ne sera bien sûr récompensé d’aucun prix.