Mediapart, 8 mai 2015, par Joseph Confavreux
Face à ce constat d’une République qui se dresse sur ses ergots avec d’autant plus de vigueur qu’elle ne remplit plus son ambition sociale, on pourra toutefois
préférer à la manière de faire de Todd, qui ne pourra que braquer par ses excès, celle initiée par l’historien Patrick Boucheron et l’écrivain Mathieu Riboulet, dans un petit livre qui paraîtra le 13 mai.
En conclusion de cet ouvrage intitulé Prendre dates. Paris, 6 janvier-14 janvier 2015, ils écrivent : « La catastrophe à venir ne sera pas ce qui surgit à la fin, mais ce qui se poursuit lentement, continûment d’un même mouvement, sans qu’on y trouve à redire. Comment se résoudre à cette continuation catastrophique ? Est-ce une vie que d’attendre ainsi docilement le nouveau scandale financier, la nouvelle victoire du Front national, le nouveau best-seller prônant la guerre civile, la nouvelle école juive mitraillée, la nouvelle vidéo de décapitation ? Du 7 au 11 janvier, les représentants politiques de la France ont, peu ou prou, porté une parole publique que l’on aurait pu croire plus irrémédiablement dégradée. Cela ne tient pas lieu de politique, mais cela la rend possible. Et voyez, depuis, comme ils se relâchent : c’est que nous ne les serrons plus d’assez près,
reprenant aussitôt la sale habitude de les laisser faire. Il vaudrait mieux éviter désormais, car le temps presse. »
C’est précisément si l’on est conscient que le temps presse pour éviter d’être broyé entre la tenaille djihadiste et la mâchoire des droites extrêmes, qui font toutes deux leur miel de l’austérité à perpétuité et souhaitent faire passer la ligne de partage des eaux de la guerre des civilisations par le Massif central, que le livre d’Emmanuel Todd peut être utile et pertinent, au-delà de ses éructations.