Le Monde, 25 novembre 2016, par Elena Balzamo
Mentir n’est pas trahir
« Pour la petite histoire… » Cette formule toute faite et si souvent employée définit parfaitement la mosaïque de brefs récits mettant ici en scène les grands écrivains du panthéon russe – Pouchkine, Tioutchev, Gogol bien sûr… –, mais aussi des auteurs de l’Antiquité, comme Ovide ou Catulle, des philosophes – Schopenhauer, Nietzsche… – et même des apôtres tels saint Matthieu ou Saint Luc ! Cette foule d’anecdotes, tour à tour pathétiques ou loufoques, véridiques ou apocryphes, est censée rendre plus vivantes ces icônes du passé et les rapprocher du lecteur. Né en 1959 et descendant des Cosaques du Don, Vladislav Otrochenko était déjà traduit en France – Mes treize oncles (Verdier, 2012). Dans cet ouvrage où les deux Histoires, la grande et la petite, s’entrelacent sans cesse, il fait l’apologie du « mensonge inspiré et gratuit ». Un mensonge qui, selon lui, relève du « droit sacré de s’approprier une réalité imaginaire ». Et qui projette sur les œuvres une lumière oblique, stimulante et inattendue.