Le Monde des livres, 1er octobre 2021, par François Angelier

Solitude âpre et agreste que celle du narrateur anonyme de La Petite Lumière, de l’écrivain italien Antonio Moresco. Replié dans les ruines d’un hameau déserté, « venu ici pour disparaître », y menant la vie frugale et mesurée d’un ermite-poète, solitaire franciscain qui interpelle oralement bêtes et arbres, il est frappé puis peu à peu fasciné par l’apparition nocturne et quotidienne, quelque part dans la montagne, d’une « petite lumière » . Une lueur tenace et fragile, insensée, à la ponctualité énigmatique, qui devient l’unique souci de ses jours. Lancé dans l’élucidation de ce mystère, on l’attire d’abord sur la voie ufologique, voie sans issue. Parvenu avec peine au foyer précis où point la lumière, il y découvrira un tout autre secret, fantomatique et eschatologique. Long conte ou court roman, le texte de Moresco, pure splendeur, entrelace l’émoi fantastique et la violente étreinte d’une poésie chtonienne, celle d’un « paysage primordial modelé à coups de pouce » où s’empoignent pierres et plantes, cieux et rivières, le nœud de forces tapi dans l’épaisseur du monde, l’âme apocalyptique d’une matière en proie à la virulence de sa force.