L’Obs, 30 septembre 2021, par Élisabeth Philippe
Au nom du père
Ni fleurs ni couronnes. Le premier texte d’Anne Pauly, Prix du Livre Inter 2020, est un récit de deuil, mais n’est en rien un tombeau pompeux ou funèbre. L’écrivaine raconte la mort de son père et la confusion des sentiments qu’elle entraîne. Comment pleurer cet homme Janus, transfuge de classe, lecteur de Lao-Tseu et de François Villon, qui a fini sa vie malade et seul, mais qui fut aussi alcoolique, violent et qui les a fait vivre son frère, sa mère et elle « dans une ambiance de guerre civile » ? Comme il arrive parfois dans les enterrements que le rire se mêle aux larmes, Anne Pauly fait se côtoyer le burlesque et le tragique. D’une écriture sobre, ponctuée de « check », d’italiques mordantes, d’onomatopées et même d’une chanson de Céline Dion qui résonne comme une déflagration, Anne Pauly s’acquitte avec panache et tendresse de la mission qu’elle s’est donnée : « honorer (la) mémoire de vaincu » de son père, lui érigeant un beau et modeste monument au mort.