La Dépêche du Midi, 16 janvier 2022

« La bonne distance », la corrida et le deuil

Dans ces courts récits, tirés pour la plupart des jours heureux où, avec son frère, le grand matador Nimeño II, Alain Montcouquiol pose un regard plein d’affection sur les hommes, leurs peines, leurs grandeurs et leurs ridicules.

Alain Montcouquiol, c’est Nimeno, qui avec Simon Casas de Nîmes appartient à la première génération de toreros français. Son frère cadet, c’est Christian, Nimeno II qui a été la première grande vedette française de l’arène et qui a préféré se donner la mort en 1991, parce que son bras infirme ne lui permettait pas de toréer à nouveau, après son accrochage par un monumental Miura à Arles en 1989.

Alain ne veut pas être « le frère d’une statue », celle de Nimeno II, sise face aux arènes de Nîmes car pour lui il reste vivant dans son cœur et celui de la grande famille (la petite sœur est devenue Tarnaise) et dans celui des aficionados. Dans tous ces livres, ici le quatrième, il n’a de cesse de parler de lui.

Plume sensible

En courts récits, c’est un monde disparu de la corrida qui revit. Souvenirs personnels et subjectifs, par une belle plume sensible. Le premier voyage à Séville pour le jeune Nîmois, les temporadas (les saisons tauromachiques) au Mexique et Colombie, où il accompagne son prodige de frère, les personnages du monde de la corrida souvent has been : anciens matadors, picadors, banderilleros ou péones retrouvés à Nîmes, capitale de la tauromachie française.

L’aficion, l’amour de la corrida, il la fait vivre avec nostalgie et pour les Tarnais qui n’ont plus la corrida à leur porte avec la fin des courses à Toulouse et Fenouillet, c’est un appel pour les places plus lointaines avec le calendrier rituel : Pâques à Arles, Pentecôte à Nîmes ou Vic, été de Bayonne, Mont-de-Marsan, Dax, Béziers, etc.

L’humour n’est pas absent. À découvrir le slip français vainqueur du caleçon long espagnol, le gin comme antiseptique après une étreinte avec une inconnue.

La poésie aussi dans les évocations du ciel et de la ville de Nîmes, où il vit face aux arènes : le mistral, les étourneaux. L’ancien matador est un vrai écrivain.