L’Alsace, 2 mai 2025, par Jacques Lindecker

Lettre à l’enfant

Il s’était réfugié dans un chalet de famille près du lac de Constance, cet écrivain qui ne parvient pas à renouer avec l’écriture. Il y a eu ces moments d’allégresse, sexuelle notamment, avec la jeune Natascha. Mais Elena, l’ancienne compagne, avec qui l’histoire commune s’est très mal terminée, l’appelle : « Viens me voir, viens nous voir, en Sicile. Tu manques à ton fils, Marc. » Mais au moment de partir, le cœur de l’écrivain s’emballe, menace de s’arrêter : ambulance, urgences, chirurgie, chambre d’hôpital. Là, durant sa convalescence, la vie (souvenirs d’enfance et de voyages, Paris, Islande, Tunisie) et la mort (« je suis trop jeune pour mourir », et pourtant elle rôde) dansent une sarabande mélancolique, mais où la lumière parvient obstinément à s’extirper de l’obscurité. Comme une lettre à Marc, mais surtout à lui-même, cet homme, qui a passé sa vie à fuir, tient, stoppé net dans cette chambre, l’occasion de revenir sur les images du passé, bonheurs et regrets inclus. De faire la paix avec lui-même. D’en rire, qui sait ?