Olé !, 26 septembre-10 octobre 2012, par Daniel Bégard
Les opportunités commémoratives auront suscité l’intérêt des éditeurs pour une période, généralement occultée, celle de la fin des années cinquante, temps de troubles et d’incertitudes notamment ceux qui sont liés à la guerre d’Algérie.
Le roman de François Garcia est en marge de cette perspective dans la mesure où cet auteur mène l’écriture d’une sorte de saga familiale bordelaise dans laquelle cette nouvelle pièce viendra s’insérer.
De plus, ce dispositif préexistant lui permet de construire son roman en mêlant astucieusement un univers déjà reconnu et clos et les événements qui l’assaillent avec plus ou moins d’intensité. Le narrateur, probablement double de l’auteur, est en conséquence un jeune garçon ordinaire et par là préservé par sa naïveté encore enfantine de ce qui affecte les adultes, famille et voisins, d’un quartier commerçant. Et Federico, c’est son nom, racontant ce qu’il voit et ressent, devient ainsi le fil fragile qui maintient le lien dans une communauté de fait, celle du magasin familial et de ses employés ou clients. Parmi ceux-ci deux jeunes gens, Karim et Maxime.
C’est le destin tragique de ces deux-là, emportés par la cruauté du temps et ses ambiguïtés politiques, qui articule ce livre. D’où une construction en vis-à-vis confrontant d’une part, la naïveté de l’enfance et l’incompréhension ou l’indifférence des adultes qui l’entourent, et d’autre part, les terribles logiques de l’engagement des jeunes hommes. Ce qui permet aussi à François Garcia de contourner la vraisemblance des situations et les dangers de la reconstitution.
Federico ! Federico ! n’est donc pas réellement un livre de plus sur les événements d’Algérie. Ceux-ci ne sont pas non plus et seulement la toile de fond pour le récit d’un moment d’enfance bordelaise. Reste un bon roman classique qui incitera à suivre, ou à découvrir, la saga Garcia et le destin de Federico.