L’Humanité, 31 mars 1993, par Jean-Claude Lebrun
François Bon, c’est une musique de la langue. Non pas évidemment celle de l’harmonie décorative ni des joliesses ornementales, mais un rythme puissant, une obstinée scansion montant des profondeurs du texte, âpre, prenante, qui peu à peu fait surgir de cette expression d’apparence torturée un véritable miracle de clarté. Et à chaque livre le prodige se répète, avec d’abord le choc d’une phrase façonnée de façon qu’on dirait étrange, faisant naître un son inouï, comme de notes incongrûment assemblées (…), puis la perception d’un ordre voulu là derrière, d’une tonalité autrement construite, d’où du sens, dans une manière de pureté nouvelle, se dégage. Une architecture hautement élaborée pour, comme dans le meilleur d’un opéra, parvenir à faire vibrer, en résonance avec le son pur qui en émane, quelque corde essentielle en chacun de nous. Complexité de l’élaboration et netteté des effets : du très grand art.