Le Nouveau Recueil, mars 1997, par Yannick Mercoyrol
[…] La puissance du texte de Jean-Yves Masson réside en ceci que l’exil politique se retourne paradoxalement en bonheur, en immobilité historique où, dès lors, le temps subjectif de la conscience et du corps peut être déplié par un narrateur rédigeant comme sur un palimpseste les souvenirs de ces temps majeurs qu’il avait déjà consignés à l’époque en un journal égaré depuis. L’île ne figure donc, au bout du compte, que la radicalisation des données initiales. Le temps peut alors se dévoiler dans sa dimension réelle : non pas à travers le cloisonnement qu’on établit d’ordinaire, mais comme une chambre où coexistent les durées, confusion d’un passé encore ici et d’un futur déjà là. « Tout nous vient de l’avenir » écrit le narrateur, résumant par là l’essentiel de son expérience ; dans cette stase hors de l’historicité s’approfondit un destin, se découvre et se dérobe un être.