Télérama, 1er novembre 2006, par Martine Laval
Quinze mille pas, ou quinze mille mots, sans doute davantage, tous brûlants. Thomas, le narrateur, voit son univers s’écrouler, la mort le frôler sans répit – parents, sœur et frère, tous disparus. Il est seul, reclus en lui‑même. Il marche, raconte ce qui le mène ici ou là, dans un no man’s land italien de villes laides, moribondes. Il marche, marche, et compte ses pas. C’est son obsession, sa folie, sa méthode de survie. C’est aussi le phrasé exceptionnel de Vitaliano Trevisan, jeune auteur pour la première fois traduit en France. Ce roman – ou compte rendu d’une divagation existentielle – est un déluge verbal de haute voltige, une logomachie érudite pour dire la catastrophe, la faillite du monde. Vitaliano Trevisan – tout comme Horacio Castellanos Moya, auteur de l’irrésistible Dégoût – fait de la littérature coup de tonnerre, coup de gueule. Dans le sillage d’un autre Thomas, fou du langage – Thomas Bernhard.