Pierre Dumayet
Brossard et moi
En toute simplicité, subrepticement, Pierre Dumayet nous restitue cette arche de Noé témoin d’un temps d’avant la loi, salut aussi d’une espèce humaine miraculée sans nécessité. Brossard et moitresse sensiblement pour notre plus grand plaisir une métaphysique ordinaire. Le récit baroque soliloque sur un mode impressionniste avec chacun en propre, mais par hasard. Écrit en creux, il nous convie au festin des restes.
Nous ne sommes pas pires que les autres. Nous sommes pareils aux autres. C’est moi qui déparle. J’essaie de décrire ce que je vois comme si j’étais aveugle, pour l’entendre lire et ensuite l’imaginer. Je ne comprends rien directement. Quelqu’un, dans un livre, se demande ce qui se serait passé, si Dieu, au moment d’exiger la mort d’Isaac, avait oublié combien d’enfants avait Abraham. En se posant cette question, on comprend mieux l’idée du sacrifice. On passe du rire à l’angoisse. Mon intention est beaucoup plus humble. Je voudrais seulement saisir la paille qui n’est pas toujours dans l’acier. Tout ce qui annonce et justifie la mort, si vous préférez. À la bonne franquette, cela va de soi. La mort est à la portée de tout le monde. On croit ne s’en servir qu’une fois ; c’est discutable.