Jacques Réda
L’affaire du Ramsès III
Collection : Collection jaune
128 pages
12,17 €
978-2-86432-409-6
mars 2004
La vie est remplie d’événements. On les recherche ou on les provoque, on en profite ou on les subit. Une prudence qui naît de l’expérience peut pousser à les éviter. Tel est le cas du narrateur de cette « affaire », qui s’est toujours efforcé de vivre au large du monde des événements. Mais ils ont leurs idées et, grâce à des rabatteurs adroits, capturent par surprise les personnages dont ils ont besoin pour s’accomplir.
Ainsi (et en l’occurrence le danger vient d’une belle rabatteuse), une paisible étape dans un chef-lieu de la Côte d’Or va-t-elle conduire un amateur de randonnées cyclistes dans un bateau de croisière qui remonte le Nil : le Ramsès III où plusieurs crimes mystérieux se perpètrent. N’a-t-on pas déjà lu quelque chose d’analogue quelque part ? Oui, mais notre modeste historien spécialiste de Bonaparte manque d’érudition sur ce point. Il n’en tombe que plus facilement dans le piège. Voyons comme il s’en sortira.
Nous nous tenions en somme mutuellement la dragée haute, moi feignant un intérêt croissant pour lui faire une cour de moins en moins discrète, elle se prètant au jeu afin de m’amener à souscrire un de ces contrats qui m’auraient expédié à Hong Kong ou aux Caraïbes, à Saint-Pétersbourg ou au Kenya, en Égypte, oui, de préférence en Égypte, car c’était la spécialité de Faraorama. Et en fin de compte, après quelques jours de tergiversations où je crus avoir accompli des progrès foudroyants (Clotilde avait accepté une invitation au restaurant, puis une autre au cinéma où nous avions revu une version doublée de Cléopâtre), finalement, donc, ce fut l’Égypte. Voici pourquoi : malade, tout médecin qu’il était, un certain docteur Cr. venait d’annuler inopinément sa triple réservation pour une croisière sur le Nil en compagnie de sa femme et de sa fille, à quarante-huit heures du départ. C’était à la fois un coup dur pour une agence aussi modeste, et un coup de chance pour moi. Clotilde se faisait fort en effet de m’obtenir des conditions exceptionnelles si j’acceptais de remplacer les Cr. au pied levé. Mais m’accompagnerait-elle ?, soupirais-je dans un élan de lyrisme génésique, l’étreindre sous le regard contemplatif de plus de quarante-deux siècles ! Remonter puis redescendre des Nil de toutes les couleurs sur le fleuve blond de sa chevelure ! Était-ce possible ? Ah, mais pas du tout du tout !