Cristina Comencini
Sœurs
Roman. Traduit de l’italien par Carole Walter
Collection : Terra d’altri
192 pages
14,70 €
978-2-86432-313-6
septembre 1999
Le troisième roman de Cristina Comencini ressemble à ces duos pour violon et alto de Mozart où deux voix très proches, subtilement décalées, forment une tresse, échangeant leurs thèmes. Isabella et Maria, deux sœurs appartenant à la bourgeoisie romaine, deux enfants des années cinquante, incarnent apparemment des choix opposés devant l’énigme de l’existence : Isabella, que sa sœur évoque après qu’elle a disparu en mer, semblait tout entière risque et folie, et Maria la gardienne des rêves de sa cadette. L’une et l’autre ont connu l’engagement politique et son deuil. Maria, tentée par une vie plus conventionnelle, a fini par rejoindre son milieu d’origine tandis qu’Isabella, tenaillée par une quête incessante, parcourait le monde au gré des rencontres. Elles ont aimé le même homme, un Turc nommé Mehmet, apparu au cœur des aventures de l’une, du quotidien de l’autre, et qui personnifiait l’espoir d’indépendance d’une génération dont les idéaux déçus n’avaient pas encore sombré dans le cynisme.Une telle répartition des rôles est toutefois trop simple : au fil des années, la liberté d’Isabella s’est transformée en une sorte de piège, et la prudence de Maria en un choix profondément assumé. Dès lors, leurs visages tendent à se confondre, chacune est plus que jamais la mesure et le reflet de l’autre, aussi nécessaire que déformé.
Deux destins, deux gouttes sur une vitre, que le moindre souffle peut fondre en une seule ou séparer à jamais.
Je m’appelle Maria et le prénom de ma sœur est Isabella. Mais la différence des prénoms n’est qu’apparente. En réalité nos parents nous avaient donné le même : à elle Isabella Maria et à moi Maria Isabella. Mon père nous photographiait toujours ensemble et ma mère nous habillait souvent avec des vêtements identiques de couleurs différentes. L’idée que nous devions être deux moitiés de la même pomme, deux perles dans la même coquille, était de leur part un projet non dissimulé. Longtemps nous nous sommes endormies en faisant des conjectures sur notre prénom. Nos natures opposées (alors déjà, en bonnes filles, nous avions mis tout notre soin à décevoir leurs attentes de ressemblance) se manifestaient dans ces rêveries.
« Si l’une de nous deux meurt, alors ils pourront remplacer le prénom de la vivante par celui de la morte, sans avoir à changer quoi que ce soit à l’état civil, lui disais-je sur un ton aussi lugubre et réaliste que mes pensées.
— Au cours d’une nuit de pluie et d’éclairs, ils ont rêvé de deux fillettes, deux gouttes d’eau du même nuage, arrêtées sur la vitre où elles étaient tombées, immobiles », chantait sa voix à mon oreille sourde à toute fantaisie.
Le Journal de la rentrée littéraire (Fnac), 18 septembre 1999, par Nathalie Masseau
La Vie, 23 septembre 1999, par Élisabeth Nicolini
La Croix, 30 septembre 1999, par Francine de Martinoir
La Quinzaine littéraire, 1er octobre 1999, par Monique Baccelli
Reg’arts, octobre 1999, par Valérie Hernandez
Elle, 25 octobre 1999
Le Figaro, 11 novembre 1999
Lire, janvier 2000, par Catherine Argand
Le Nouvel Observateur, 2 décembre 1999, par M. F.
« Marque-pages », sur France Culture, par C. Mourthé, le 10 septembre 1999.